Je m’appelle Christelle, j’ai 38 ans, mariée depuis 15 ans et je souffre d’endométriose depuis 5 ans maintenant.
Comme presque toutes les filles/femmes, j’ai toujours souffert de crampes et douleurs durant mes menstruations avec la sempiternelle réponse lapidaire : « C’est normal que tu aies mal, tu as tes règles ! »
Alors, d’accord. Oui, il est normal de ressentir un inconfort plus ou moins grand lorsque l’on se retrouve dans ce cycle où toutes les hormones sont en ébullitions et où le corps se remanie… Ce n’est pas anodin.
Mais non, ce n’est pas normal qu’une adolescente se trouve alitée avec une bouillotte et des antidouleurs à chaque cycle menstruel, pas normale de perdre des litres de sang et se retrouver en anémie. Mais voilà, c’est pourtant la seule réponse que j’ai eue toute ma vie de femme.
J’ai cependant eu énormément de chance, car je suis tombée enceinte très facilement et très vite. J’ai eu une grossesse sans problème et un accouchement rocambolesque, mais sans lien aucun avec ce qui me fait souffrir quasi quotidiennement maintenant.
Comme beaucoup de personnes encore (malheureusement), j’estimais, après la naissance de ma fille, que je n’avais pas besoin de continuer à consulter un gynécologue aussi assidûment puisque je ne désirais plus d’enfant. Et de fil en aiguille, prise dans les journées bien remplies, et le manque de motivation, je me suis retrouvée à ne plus avoir vu de gynécologue pendant 9 ans ! Jusqu’au jour où, pliée littéralement en deux sur mon lieu de travail (je travaille à l’hôpital), je n’ai d’autres choix que de me rendre aux urgences gynécologiques.
Commence alors une longue valse d’examens et de consultations avant d’avoir un nom sur ma douleur insoutenable.
Aux urgences, on me parle de kystes ovariens qui auraient éclaté. On me donne des antalgiques et la consigne de voir un gynécologue pour refaire une échographie.
La semaine suivante, le gynécologue consulté me confirme la présence de deux kystes, intacts, d’un diamètre de 4 cm chacun, sur chacun de mes ovaires. Imaginez une bougie chauffe-plat sur chaque ovaire. Selon le médecin, cela expliquerait mes douleurs… NON sans rire ?!
Au fil du temps, près de 6 mois, la douleur persiste et s’accompagne désormais de pertes sanglantes fréquentes et abondantes. On réalise une première IRM abdominale afin de déterminer s’il n’y a pas d’autres atteintes qui expliqueraient le fait que rien ne parvient tout à fait à faire disparaître la sensation atroce que mes ovaires cherchent à s’arracher d’eux-mêmes et à s’enfuir.
L’IRM révèle alors ce dont je souffre : ENDOMÉTRIOSE. Le nom est lâché.
À toutes mes questions, les réponses de mon médecin ne me vont pas.
« — Qu’est-ce que c’est ?
– Une affection de l’endomètre qui prolifère de manière erratique et créé des masses. La maladie est peu connue.
– Comment le soigne-t-on ?
– On ne le soigne pas, on le jugule à l’aide d’hormones de type pilule.
– Peut-on opérer ?
– Oui, mais cela ne sert à rien, car vous souffrirez toute votre vie, car le corps garde la mémoire de la douleur… »
Je suis sidérée par ces réponses et profondément désespérée, car l’endométriose pourrie non seulement mon corps avec les souffrances, les nuits sans sommeil à pleurer, prier pour un moment de soulagement ; mais également ma vie active et sociale, puisque à lutter quotidiennement pour garder un visage de façade avenant, sans rien laisser paraître de mes tourments, je n’ai plus aucune énergie pour voir des amis, sortir en amoureux ou jouer avec ma fille.
Petit à petit, je m’étiole.
Alors un jour, je prends mon courage à deux mains et me renseigne sur tout ce que je peux trouver sur cette maladie, des remèdes alternatifs pour améliorer son confort.
Je trouve le nom d’un spécialiste lyonnais de cette affection et prends rendez-vous avec lui.
La lumière au bout du tunnel semble enfin poindre. Seulement voilà, parfois le système de santé est un peu biaisé, le médecin spécialiste travaille dans un centre privé gynécologique et dans ce genre de lieu on vous incite à plus et plus cher. Donc, après m’avoir dit que l’on pouvait m’opérer et ainsi me libérer de la souffrance (et non elle ne resterait pas à vie), mais qu’avant cela, étant donné que je suis obèse, je devrais faire pratiquer une sleeve (une intervention chirurgicale visant à retirer les deux tiers de l’estomac pour que je perde 30 kg) sans cela l’opération pour l’endométriose serait trop risquée et je pourrais me retrouver avec un anus artificiel.
À cet instant-là, j’avoue que des idées très sombres me traversent alimentés par les très gros antidouleurs (morphiniques, opioïdes… etc.) que je consomme quotidiennement.
Après un bon mois de découragement total, je remets le pied à l’étrier, et entame un régime drastique (car je refuse de me faire charcuter l’estomac pour rien) et perds près de 13 kg.
Seulement, on n’est pas au 30 kg demandé par le spécialiste et malheureusement, plus aucun antalgique ne fonctionne. Je ne dors plus, ne trouve pas de positions relativement confortables pour me tenir… Bref l’enfer !
Dans mon malheur, j’ai tout de même trouvé quelques astuces et soins parallèles me soulageant momentanément :
• Les infusions d’achillée mille-feuille
• Les massages ostéopathiques d’une faciathérapeute
• La méditation pleine conscience
• Une bouillotte-ceinture devenue ma meilleure amie
En désespoir de cause, je décide de consulter un 3e gynécologue. Ce dernier, me reçoit, m’ écoute, me rassure et tente de changer ma pilule afin de juguler le développement des masses. Pendant 5 mois cela tien, bon an mal an, puis tout s’accélère : mes pertes de sang deviennent hémorragiques et quotidiennes au point qu’il faut mettre en place un traitement de l’anémie, et surtout, la douleur est devenue telle que je n’ai qu’une envie mourir…..
Mon nouveau gynécologue entend ma souffrance et accepte de m’opérer pour m’ôter les masses qui sont devenues gigantesques (8 cm chacune, l’équivalent de balles de tennis) et qui ont développé des adhérences avec tous les organes limitrophes : utérus, ovaires, rectum, intestin, formant un énorme nœud.
Dès le retour du bloc opératoire, c’est une résurrection : plus de douleur, ce bruit de fond depuis 2 années, a enfin disparu. Vous ne pouvez imaginer (ou peut-être que si) ce que représente cette disparition.
À l’heure où je vous écris, cela fait 3 ans que l’on a procédé à cette kystectomie ovarienne bilatérale, pourtant, bien que plus confortable, je ne suis pas guérie. J’en suis à ma 4e pilule contraceptive, car mon corps s’habitue aux hormones et les contourne . Les douleurs lentement, sournoisement commencent à revenir, les pertes de sang aussi… et malheureusement la loi ne me permet pas de faire retirer mon utérus (source d’endomètre) avant mes 40 ans révolus et si le corps médical trouve judicieux de le faire. Mon avis seul ne compte pas. Mes désirs (ou plutôt mes non-désirs )d’autres maternités ne pèsent pas, car je « pourrais changer d’avis et vouloir encore des enfants… »
Il faut que cela change, mais c’est un autre combat…